đź”»La psychologie au secours de la mythologie
Les dieux se sont endormis depuis belle lurette.
Du moins c’est ce que l’on croit généralement. Merlin, le prophète magicien des légendes arthuriennes, s’est éclipsé. La fée Viviane lui a jeté un sort et l’a enfermé dans une prison de glace. Mais Merlin n’est pas mort pour autant.
La fin des légendes ?
La mythologie, les légendes ont quitté la scène, balayées par la raison. Mais elles ont été remplacées par des interprétations psychologiques de la réalité. Et, si on y regarde de près, ces interprétations jouent un rôle analogue à celui des mythes.
Les mythes ne sont pas seulement un ramassis de rumeurs, d’événements invérifiables, qui n’ont pas de prise sur la réalité. Les mythes sont des ensembles de croyances qui reposent sur des pratiques, des rituels qui, pris dans leur ensemble, répondent à notre soif insatiable de vouloir tout expliquer. Mircea Eliade affirmait que les mythes ne disparaissent pas, ils ne font que changer d’aspect.
La culture occidentale a d’ailleurs développé un goût marqué pour la mythologie. Le héros, par exemple, y occupe une place centrale.
De nos jours, les portails pour pénétrer dans le monde mythologique moderne sont les romans, les séries télévisées, les jeux vidéo, les bandes dessinées, mais aussi le théâtre consumériste qui affiche les images paradisiaques de vacances de rêves, de la retraite à 50 ans, des runnings qui feront de vous des athlètes.
Le petit nouveau
Récemment, un nouveau portail est apparu : les réseaux sociaux. Ils ont permis la diffusion de récits individuels, hautement romancés, pas toujours conformes à la réalité : une quête personnelle sur fond de performance physique ou d’exploit sportif, le retour vers la terre de ses ancêtres. Autant de pistes à saveur mythologique dans lesquelles des individus incarnent un héros à la recherche d’un espace intérieur, une aventure où la foi et la recherche de sens jouent un rôle primordial.
Quand la psychologie se substitue à la mythologie.
C’est la psychologie qui répond en quelque sorte à notre besoin de trouver un sens et une valeur à ce que nous vivons. Le recours au biais psychologique se fait par l’entremise des rituels (livres et cours de développement personnel, tests de personnalité, etc.) des façons de revivre les mythes de la quête d’identité.
Notre besoin de mythes et de ses substituts psychologiques repose sur des croyances. Croire est l'élément clé, voire indispensable, pour consolider notre système de valeurs et donner un sens à nos actes.
Dans des sociétés qui, règle générale, sont de moins en moins assujetties à des dogmes religieux, choisir un système de croyances s’avère difficile. Il faut faire le tri parmi ce qui peut sembler parfois un fouillis inextricable de science et de superstitions.
Croire est un mode opératoire basé sur des émotions. Nous croyons ou voulons croire, par exemple, pour apaiser nos doutes, et ainsi diminuer notre anxiété et notre sentiment d’insécurité. Face à une incertitude, il nous arrive de louvoyer. Nous évitons de conclure trop rapidement, nous voulons vérifier, corroborer. Mais avec cette perplexité s’installe le doute, et donne lieu à des bouffées émotionnelles. Cette perplexité retarde le moment libérateur qui consiste à déclarer que quelque chose est vrai.
Le but d'une croyance n’est pas d’obtenir une réponse précise. Une des principales faiblesses humaines consiste à fonder les croyances sur des émotions. Les progrès récents des neurosciences ont montré à quel point les techniques modernes de marketing ont su s’emparer de ces émotions (peur, espoir, préjugés) pour mousser les ventes d’un produit. En fait, devant un choix qui s’avère trop difficile, ce sont les émotions qui l’emportent, pas la raison.
Si les croyances dictent nos comportements, le fait d’en être conscient devrait nous inciter à en faire bon usage. Connaître et consolider notre corpus de croyances, par la répétition et la pratique de rituels quotidiens, peut contribuer à nous faire évoluer, à améliorer notre qualité de vie et à réaliser nos projets avec plus de sérénité.
Envie de tenter l’expérience ?
Découvrez l’exercice No. 174
Chanter libère et procure de la joie
Référence
Gabriel, Rami. Myth and the mind. Aeon, 2021.