Les Cahiers de l'imaginaire

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<strong>Lab sociétal 🔘</strong>

Une expérience collective à ciel ouvert…

En 2014, ID Solutions et Les Cahiers de l'imaginaire ont collaboré avec Philippe Chèvremont et Marc Dewulf du Centre Héraclès— qui ont pour vocation de soutenir les entrepreneurs carolos—à réfléchir à un grand projet qui contribuera à insuffler une nouvelle énergie créatrice dans la région et bien au-delà.

Éric Lardinois et Philippe Chèvremont

Nous laisserons donc des traces de cette histoire qui se co-écrit en espérant que le plus grand nombre d'entre vous pourra prendre son tempo et y participer d'une manière ou d'une autre. Les innovations ouvertes sont aussi sociétales.

philippe chèvremont, directeur du groupe héraclès (au premier plan) — Éric lardinois et Magalie meyer sont en pleine action de création dans le métro.

D'ailleurs, Philippe aimerait que tout le monde ait au moins une très bonne raison de venir découvrir Charleroi. Faisons le pari que cette destination — avec tout ce que nous vous en dirons — sera à votre agenda d'ici trois ans. La station de métro Janson avec ses bandes dessinées où des personnages légendaires s'y cotoient comme si on était au musée de la BD est déjà une bonne raison de venir à Charleroi.

Magalie Meyer

Marc Dewulf

Sachant que nos capacités cognitives s'accentuent lorsque nous sommes en mouvement et que marcher nous aident à être créatifs et à réfléchir, nous avons fait du métro le théâtre de notre inspiration. Si vous n'avez jamais pensé au métro de Charleroi pour vos séminaires, nous vous le recommandons. Ça fonctionne !

L'hypothèse de départ :
En Wallonie, on pense que si chaque citoyen est créatif, le pays se développera comme jamais auparavant ! Un énoncé avec lequel Les Cahiers de l'imaginaire ne peuvent qu'être d'accord. Partant de cette hypothèse, Creative Wallonia a invité les villes wallonnes à répondre à un appel à candidatures pour la création d'un «Creative Hubs». Imaginez notre enthousiasme lorsque nous avons appris que la proposition avait été retenue... même si des mots sur le papier sont encore bien peu de choses et que tout reste à être inventé collectivement.

Rêver et faire rêver est le premier jalon de toute démarche qui veut prendre de la hauteur. À l'invitation de Philippe et de Marc, des acteurs se mobilisent pour contribuer à l'élan créatif de leur ville.

Chacun réfléchit avant tout à sa contribution personnelle, que puis-je apporter à ma ville ?

Et finalement les idées fusent, la complémentarité des talents commencent à émerger…

Et finalement Pierre Lelong ne s'impose aucune  limite : «Un Guggenheim... à la place de Carsid.»

Voilà pour le petit noyau de transformation positive. Ils souhaitent tous allumer le feu pour que le rêve et la réflexion s'élargissent aux entrepreneurs et aux citoyens de tous âges et de tous milieux pour que commence une véritable co-construction.

Le début de l'aventure tient en trois mots : Intelligence collective et créativité.

Première consige : Lâcher-prise. Laissons entrer le plaisir avant toute chose… pour que la créativité s’invite parmi nous.

Même si nous aimons être en contrôle, la raison n'est pas toujours la meilleure conseillère lorsqu'il s'agit de créativité. Il faut plutôt apprendre à se détendre et à regarder autour de soi pour puiser de l'inspiration dans ce qui nous entoure.

Il est désormais prouvé que la motivation intrinsèque (la passion que nous ressentons et qui nous poussent à apprendre et à relever des défis) est la seule qui fonctionne vraiment. La motivation extrinsèque (le bâton et la carotte) ne donne que des résultats mitigés, voire dissuasifs. Le plaisir d'accomplir ne s'achète pas. C'est même plutôt le contraire.

Selon l'auteur américain de plusieurs bestsellers sur la motivation, Daniel Pink, miser sur la motivation extrinsèque est une grave erreur. Ces tactiques amplement pratiquées en management au XXe siècle et encore au début du XIXe contribueraient plutôt à démotiver.

Cette découverte date pourtant de 1949, année où deux jeunes chercheurs (Harry Harlow et Edward Deci) alors qu'ils étudiaient le comportement des chimpanzés en leur soumettant des problèmes à résoudre dans leur cage. L'expérience a duré 14 jours. Les chimpanzés sont rapidement devenus adeptes de ces jeux. Ils réussissaient à résoudre les problèmes en moins de soixante secondes.

Ceux qui ne recevaient aucunes récompenses alimentaires étaient plus motivés et efficaces, faisant preuve de concentration et de détermination tant ils étaient motivés à trouver la solution.  Voilà qui devrait nous faire réfléchir sur notre nature profonde. Tout comme la marche nous convient mieux que la sédentarité, la recherche de la motivation intrinsèque devrait être une priorité. (1)

Toute démarche d'Intelligence collective qui ne part pas des motivations intrinsèques des participants pour permettre une véritable contribution a donc peu de chance de réussir.

L'enjeu est de créer une cohérence à partir des affinités ; une expression de cohésion pour relier les personnalités et les idées de chacun dans l'accomplissement d'une même mission.

Défi considérable qui ne peut être relevé qu'à l'aide d'une vision et de valeurs partagées. C'est la deuxième consigne!

Ce qui rend ce que l'on voit encore plus intéressant, c'est le partage de ce qui a attiré notre attention.

  • Qu'évoque ce détail?

  • Qu'en pense l'autre?

  • Quelle émotion suscite un signe sur une façade ?

  • Que cache cet humour? 

  • Quelle détresse renvoie cette image?

  • Quelle histoire de vie imagine-t-on derrière ce carreau?

La vie dans une ville se vit d'abord dans l'intime.

Photo : frédérique margraff

Comme le travail collectif doit se vivre dans le respect des singularités. C'est la troisième consigne !

Pour encourager cette réussite collective, nous devons revoir nos façons d'apprendre, de travailler et de collaborer afin que créativité, liberté et responsabilités soient comme les pas d'une même danse.

Quatrième consigne : Toujours mettre le client ou l'usager au cÅ“ur de tout service, tout produit à développer ou problème à résoudre.

Mais la pratique de l'empathie n'est pas une mince affaire. Elle exige une introspection de la part de chaque participant, sachant qu'il n'est pas toujours facile avec nos egos réciproques de se mettre à la place de l'autre pour essayer de mieux le comprendre. Cela signifie de prendre le temps de l'écouter, de l'observer, de lui poser des questions. Cela imp//ose aussi de se taire. D'offrir ce que nous avons de plus précieux, du temps, à une époque où c'est ce qui semble nous manquer le plus.

Un médecin, selon certaines recherches, consacrerait 17 secondes d'écoute à son patient avant d'émettre son diagnostic. Cette perte d'attention —qui nous concerne tous— a été soulevée par Peter Drucker qui a posé la question : Comment les personnes ayant des responsabilités de leadership peuvent-ils faire leur travail auprès de leurs équipes s'ils ne savent plus écouter ?

Depuis cette question de Peter Drucker, notre capacité d'écoute a continué à s'atrophier. Ce qui rend encore plus précieux tout exercice ou méthode de travail qui aident à stimuler la capacité d'écoute et d'observation à partir du moment où l'on choisit l'empathie comme valeur.

Réfléchir selon le point de vue de l'usager devrait être une attitude naturelle.

Il y a ensuite la difficulté de partager ses idées. Chaque personne met souvent une image différente derrière chaque mot. La meilleure façon de faire avancer une idée reste le prototypage. Faire est souvent la meilleure façon de réfléchir. Encore mieux, lorsqu'on peut le faire rapidement. À la vitesse de nos pensées. La célèbre firme de design californienne IDEO et la DSchool de Standford pratiquent cette manière de faire depuis longtemps. Plus récemment, lors d'une conférence TED, Ed de Tom Chi expliquait qu'avec cette méthode les Google Glass ont été créée en une journée ! Selon Google, il faut trouver le chemin le plus rapide vers l'expériences que nous souhaitons produire.

réfléchir en marchant

Cette approche exige aussi que chacun se réserve des temps de réflexion afin de ne pas toujours être en réaction, mais plutôt en observation pour ensuite avoir le recul nécessaire pour anticiper. Dans le mouvement accéléré du monde, prendre le temps de réfléchir exige de la discipline. En Angleterre et aux État-Unis, on a même nommé ce nouveau courant TTT pour Time To Think. Un mouvement qui ferait de plus en plus d'adeptes selon Nancy Kline. (2)

de l'autre côté du mur avec Éric Lardinois au Musée du verre de charleroi.

L'intelligence collective impacte nos manières de travailler. Redevenir plus nomades pour être plus concentrés lorsque nous faisons une pause. Mieux respirer, prendre le temps de réfléchir et surtout de rêver afin de co-inventer un avenir que nous souhaitons meilleur pour le plus grand nombre. Mais il y a aussi un danger à trop réfléchir, il faut surtout agir en multipliant les expérimentations qui seront énormément plus apprenantes. Nous savons qu'une idée est bonne seulement une fois que nous l'avons prototypée et réalisée. Les erreurs qui découlent du processus sont précieuses, bien analysée, elles sont une source infinie d'apprentissage.

Cela exige aussi de réiventer nos manières de communiquer. L'histoire n'est plus écrite par un seul, mais elle est est co-écrite et se partage avec le souci de se projeter ensemble plus loin dans une réalité immersive et positive grâce aux outils numériques et les objets connectés qui le permetttent.

Notre hypothèse : Si la maïeutique prend entre des personnes qui partagent une vision et des valeurs... et si les équipes possèdent:

  1. Le talent (les abilités intellectuelles, créatrices et pratiques),

  2. La connaissance/l'expertise sur les sujets à traiter et sur les méthodologie et outils numériques requis pour être efficaces,

  3. La personnalité, l'empathie et la réactivité (des personnes qui se complètent et s'entraident pour s'améliorer),

  4. La motivation personnelle (intrinsèque) et la liberté pour agir.

  5. Un environnement qui soutient (ressources et encouragements) les personnes motivées.

Le résultat d'une approche d'intelligence collective donnera alors des résultats spectaculaires. Par contre, s'il manque un maillon à la chaîne, tout peut s'arrêter et retomber comme l'explique bien les chercheurs Sternberg, OHara et Lubart après avoir étudié plusieurs exemples dans leur article Creativity as Investment.

Station de métro Janson, charleroi

Charleroi est un laboratoire à ciel ouvert avec des défis énormes, mais stimulants comme toutes les villes le sont.

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Références

(1) Pink D.H., Drive: The Surprising Truth About What Motivates Us, 2011, FSC Mixed Sources
(2)Kline Nancy, Time to Think, Listening to Ignite the Human Mind (1999), Octopus Publishing Group Ltd, UK
(3) Sternberg R.J., O'hara L.A., Todd I..L., Creativity as Investment, 1977, California Management Review