Les Cahiers de l'imaginaire

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La carte maîtresse de Léonard de Vinci 🟨 </strong>

Comment devient-on un grand créateur ?

Léonard de Vinci, un des plus grands esprits de tous les temps, est un homme pragmatique. Contrairement aux hommes instruits de son époque, il n'a pas été à l'université et ne connaît pas le latin, langue dans laquelle sont publiés les grands classiques et les humanités. Bien qu'il se définisse comme un homme inculte, un homme sans lettres, comme il le dit lui-même, il refuse de se laisser disqualifier par son manque d’érudition. Cette carence, au contraire, le pousse à élaborer un mode de pensée révolutionnaire.

Révisé 6 juillet 2020

Des codex qui valent plusieurs millions.

Une nouvelle étude de son journal personnel et de ses carnets — dits codex — dévoile sa curiosité, ses obsessions et sa personnalité. Ses carnets de notes, dispersés dans différentes collections, représentent six mille pages, qui, si elles avaient été découvertes plus tôt, auraient fait économiser énormément de temps au progrès.

Aujourd'hui, un seul de ses feuillets peut être estimé à plusieurs millions de dollars. Arte a présenté un documentaire intéressant sur l'exploration du 'Codex Atlanticus' (1119 pages manuscrites), le plus important de ses carnets conservé dans les sous-sols de la bibliothèque ambrosienne à Milan.

Les superbes manuscrits, commentés par des experts, nous plongent dans la tête et l'esprit de ce génie de la Renaissance.

Né le 15 avril 1452 à Vinci, un petit village niché dans les collines à l'ouest de Florence, fils illégitime d'un notaire réputé, Léonard est élevé, à la campagne, par son grand-père.

Dès l'âge adulte, il écrit en moyenne trois pages par jour dans son journal. Léonard de Vinci a consacré plus de temps à rédiger ses carnets qu'à peindre. La plupart du temps, il écrit de droite à gauche de sorte que seul lui et quelques uns de ses élèves sont habilités à comprendre. Cette écriture est naturelle pour un gaucher comme lui. Même s'il savait parfaitement écrire de gauche à droite, le fait d'écrire en miroir et d'utiliser de nombreuses abréviations rendait le déchiffrage plus difficile et l'aidait à protéger ses nombreuses découvertes.

SA CARTE MAÎTRESSE :
LA CURIOSITÉ !

Tout passionne Léonard de Vinci : l'ingénierie, la géologie, la biologie, l'anatomie. Il s'Interroge sur tout ce qu'il voit, sent, goûte, touche. À titre d'exemple, il observe qu'au loin les montagnes paraissent bleues et non vertes comme les autres les peignent. Il sait qu'en réalité, elles ne sont pas bleues, c'est en réfléchissant à la cause qu'il comprend que c'est la conséquence des reflets du soleil sur les vapeurs d'eau.

Sa façon d'associer l'art à la science est extraordinaire. Il se définit comme un peintre philosophe. Et pour lui, philosopher, c'est chercher à comprendre le monde. Parmi ses premiers sujets d'études, l'eau le fascine, car elle est très difficile à restituer avec exactitude dans un dessin ou une peinture. Il se pose la question :

Qu'est-ce que l'eau ?

Son plus ancien dessin connu, conservé à la Galerie des Offices à Florence, est une représentation de la Vallée de l'Arno dont le sujet central est une grande cascade. Dans son carnet, il écrit que l'eau est une quantité continue qui va de la mer à la rivière, de la rivière à la mer...  L’eau déferle. Elle jaillit. Elle plonge. Elle gicle. Elle murmure. Elle tombe gouttes à gouttes. Elle bouillonne. Elle gargouille. Elle s’écrase. Elle cogne... d’histoires fictives.

Léonard étudie les spirales et les tourbillons de l'eau. Cela lui inspire une théorie révolutionnaire — contestable pour l'époque — dans laquelle le mouvement de l'eau est comparable au mouvement d'une chevelure qui peut se mouvoir de deux façons en fonction du poids des cheveux ou de l'orientation des boucles. Il analyse l'eau en termes de lignes de force.

Il s'interroge ensuite sur cette même énergie dans le mouvement des feuilles des plantes, il cherche toujours comment cela fonctionne. Il veut déchiffrer les lois derrière les apparences. Un peintre, selon lui, doit comprendre les lois de la nature pour la reproduire.

Pour Léonard de Vinci, on peut tout apprendre en observant la nature.

« Le savoir commence par les sentiments, par l’expérience. Le savoir ne commence pas par l’étude du latin. Moi qui n’entends rien au latin, je dis que le savoir commence par l’amour. La nature seule peut nous guider... la nature commence par une cause et finit par l’expérience. Nous devons commencer par l’expérience afin de trouver la cause. »

- Leonard de Vinci

Plus il observe et comprend le mouvement de l'eau, plus il est convaincu que le corps humain est régi par exactement les mêmes lois que la nature.

Sa motivation :
L'AMBITION !

Léonard de Vinci est hanté par la peur de l'échec et obsédé par son désir de laisser un souvenir impérissable au monde. Dans son codex, il énonce très clairement l’ambition qui l’anime de se distinguer du commun des mortels. Il veut accéder à la célébrité de son vivant et à la postérité après sa mort.

« Ce qui est beau en l’homme ne dure qu’un temps. Rien n’est plus fugace que le temps de vie d’un homme. Mais ce temps-là est suffisant pour qui sait l’utiliser à bon escient. N’est-ce pas une vie gaspillée qu’une vie sans louanges ? L’homme qui

n’atteint pas la renommée ne laisse pas plus d’empreintes que la fumée dans le vent ou que l’écume dans l’océan ? »

- Leonard de Vinci

Vers l'âge de douze ans, il quitte la campage pour Florence. Engagé comme apprenti par Andrea del Verrochio, l'homme chargé de rajouter la touche finale à la cathédrale de Florence, Léonard apprend rapidement au point de dépasser le maître. La légende veut que Verrochio, après avoir vu une toile de Léonard, aurait cessé de peindre.

De 1495 à 1498, il est chargé par le duc de Milan de réaliser une peinture sur le mur du réfectoire d'un monastère : La Cène, connue comme l'un des plus grands chefs d'œuvre de tous les temps.

Même si c'est par la peinture qu'il obtient sa renommée, à cette époque, les peintres ne sont pas des super-stars. Ce sont les architectes et les ingénieurs qui tiennent le haut du pavé de l'échelle sociale. Jusqu'à son décès, à l'âge de 67 ans, le projet qui lui tiendra le plus à cœur et qu'il pense qui pourra le rendre plus célèbre que Brunellschi est de faire voler l'homme. Son dessin réalisé en 1494, L'homme de Vitruve est aujourd'hui le dessin le plus célèbre au monde.

Son plus ancien souvenir, écrit-il, est d'avoir vu, en rêve, un oiseau de proie descendre sur son berceau et lui ouvrir la bouche avec ses plumes. Il en a déduit que son destin était d'étudier les grands oiseaux. Ce souvenir du rêve d'un oiseau aux ailes immenses sera donc l'élément déclencheur de ses recherches.

Il  fait un pas de géant, le jour où il constate que l'air réagit exactement comme l'eau. Il tente alors d'évaluer le nombre de tourbillons d’air que fait un oiseau en volant et combien il en faudrait à l'homme pour réussir à voler. Encore une fois, après les célèbres physiciens Einstein et Bohr, voici un autre génie, qui devait être un rêveur lucide. Sa façon précise de décrire ce que verrait et ressentirait un homme en volant est saisissante pour l'époque.

Puisque les ailes en plume seraient beaucoup trop lourdes, il s'inspire plutôt des ailes de la chauve-souris et de l'aigle. Son premier prototype, surnommé l'hélicoptère, ne fonctionne pas, mais il continue à étudier le vol plané avec passion jusqu'à la fin de sa vie.

Vers 1503, Léonard de Vinci, comme nous le savons , applique le résultat de toutes ses recherches sur le mouvement, la nature, la géologie, les effets de l'atmosphère, la distance, les proportions, la gestuelle et l'anatomie humaine, tout se trouve réuni dans cette seule et même peinture : La Joconde.

SA PASSION :
L'INVENTION !

Qu'il s'agisse du vol d'un oiseau, du fonctionnement de notre corps ou des schémas mathématiques prévalant dans la nature, il a toujours le même désir obsessionnel de tout connaître. Son immense capacité à comprendre le monde environnant et sa passion de traduire ce qu'il observe dans la nature en innovations diverses est simplement à couper le souffle.

Que nous apprend Léonard de Vinci ?

Attention au conformisme. À trop vouloir faire comme les autres, nous perdons nos capacités créatives et inventives. Ré-apprenons à voir le monde qui nous entoure avec un regard neuf, un regard d'enfant. Inventons nos propres codes.

Plusieurs siècles après Léonard de Vinci, la nature est toujours aussi inspirante. Elle est notre meilleur guide.

Comme je le conseille toujours : Tenir un journal intime pour y noter nos sentiments, nos observations, nos apprentissages... et pour y dessiner nos idées. Le carnet personnel est l'outil le plus précieux de la créativité.

Garder près de son lit, un carnet de rêves, une source illimitée d'inspiration et de pistes à suivre. 

Envie de tenter l’expérience ?

Découvrez l’exercice No. 199

Penser comme Léonard de Vinci

Source—ARTE Documentaire. Leonard de Vinci, Dans la tête d'un génie, by Julian Jones 


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