Sabine Meier đš L'Art de Capturer l'Invisible
Dans son Ćuvre, Sabine Meier interroge lâessence même de la photographie en jouant avec la frontière entre réalité et représentation. Lauréate de la bourse 50 CC Air de Normandie 2024-2026, elle construit des espaces autant quâelle les photographie, brouillant les repères du spectateur. Son projet Les Cellules, distingué cette année, illustre parfaitement cette quête de lâinvisible.
Un Parcours de Peintre à Photographe
Née en 1964, Sabine Meier a dâabord suivi une formation en peinture à lâÉcole nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris, dans lâatelier de Christian Boltanski. Câest pourtant à travers lâobjectif quâelle a trouvé son véritable langage. Ce passage dâun médium à lâautre nâest pas anodin : il témoigne de son questionnement incessant sur la représentation du réel et sur lâéchec inhérent à toute tentative de capturer fidèlement le monde par lâimage.
« La photographie ne mâest jamais apparue comme le moyen le plus efficace pour représenter fidèlement le monde, » confie-t-elle. « Jâai commencé la photographie par le constat dâun échec. Étudiante en peinture, alors que je cherchais à documenter mon propre travail, jâai éprouvé lâimpossibilité de rendre compte de ce que jâavais sous les yeux. »
De cette prise de conscience est née une Ćuvre où la photographie ne se contente plus de saisir un instant, mais devient un processus de transformation et de questionnement.
Une Ćuvre Entre Construction et Illusion
Derrière chaque image de Sabine Meier se cache une architecture pensée, conçue et façonnée dans son atelier. Les Cellules, son projet en cours, illustre cette démarche singulière. Composé de trois parties â des dessins au crayon noir, des structures en volume et des photographies de ces constructions â ce travail questionne lâespace et sa représentation.
« Jâai travaillé à partir de modèles de confessionnaux, dont jâai répertorié les différentes configurations et dessiné des archétypes. Les points de fuite divergent jusquâà produire un espace inconcevable, que pourtant je construis matériellement, » explique-t-elle.
Les volumes en contreplaqué, dâenviron deux mètres de hauteur, sont fabriqués avec une précision quasi chirurgicale. Une fois construits, ils sont photographiés sur un fond de velours noir, lâéclairage travaillant à les faire apparaître comme flottants, presque irréels. Lâartiste y orchestre une tension fascinante entre la matière brute et lâimmatériel, entre le tangible et le conceptuel.
Un Travail Reconnnu sur la Scène Internationale
Loin dâêtre une figure émergente, Sabine Meier a déjà ancré son Ćuvre dans le paysage de lâart contemporain. Son travail a été exposé en France et à lâétranger, notamment au MuMa du Havre, au Musée Dostoïevski à Saint-Pétersbourg, au Château dâEau à Toulouse, ainsi quâau Knockdown Center à New York. Plus récemment, elle a participé au festival Düsseldorf Photo+ et a présenté ses Ćuvres au Centre dâart de la Matmut. Ses photographies figurent dans plusieurs collections publiques et privées, dont le Fonds national dâart contemporain, le FRAC Normandie, et le Goethe Institut.
Elle est aujourdâhui représentée par les galeries Rupert Pfab à Düsseldorf et Annie Gabrielli à Montpellier.
LâArt Comme Expérience Sensorielle et Intellectuelle
Si la photographie de Sabine Meier intrigue autant, câest parce quâelle se situe au carrefour de plusieurs disciplines : lâarchitecture, la sculpture et la peinture y dialoguent, créant des Ćuvres qui ne se contentent pas dâêtre contemplées, mais qui imposent une réflexion.
Retour sur ses Ćuvres Antérieures
Avant Les Cellules, Sabine Meier sâest illustrée à travers plusieurs séries marquantes, chacune approfondissant son exploration des limites de la photographie. Les Systèmes de Classement questionnait la manière dont nous ordonnons le visible, en jouant sur des compositions où lâordre et le chaos sâaffrontaient subtilement. Avec Les Autoportraits, 7 Métamorphoses, elle utilisait son propre corps comme support de transformation, brouillant les frontières entre identité et représentation. Apories, quant à elle, poussait plus loin la réflexion sur la perspective et la distorsion de lâespace, annonçant déjà les préoccupations spatiales qui prennent toute leur ampleur dans Les Cellules.
Son travail questionne non seulement la perception, mais aussi la manière dont nous nous projetons dans lâespace et dans lâimage. Les Cellules sâinscrit dans cette démarche, explorant les écarts entre espace physique et espace mental, entre image et réalité.
À travers ses compositions minutieusement élaborées, Sabine Meier nous invite à regarder autrement, à ressentir le poids du vide autant que celui de la matière. Son Ćuvre, à la fois exigeante et accessible, incarne cette quête infinie de lâart : faire surgir lâinvisible dans lâévidence du regard.
Source :
Dossier, SABINE MEIER, la LAUREÌATE DE LA BOURSE 50CC AIR DE NORMANDIE 2024-2026 une bourse de creÌation et de production