Les Cahiers de l'imaginaire

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Fauteurs de trouble agréable 🔸</strong>

pour changer de comportements !

Nous voulons tous changer certaines choses en nous. Nous connaissons les mauvaises habitudes dont nous aimerions nous débarrasser. Mais la plupart d’entre nous éprouvent beaucoup de difficulté à s’organiser pour modifier concrètement et durablement ses comportements.

Révisé 8 juillet 2020

Dr. Matthias Laschke, Design industriel et philosophie, Fauteurs de troubles agréables pour changer de comportement par Sylvie Gendreau

2 Aspects de notre personnalité
entre en conflit

Lorsque nous voulons changer un comportement, deux aspects de notre personnalité entrent alors en conflit. Imaginez-vous devant une tablette de chocolat. Vous êtes face à deux exigences contraires et simultanées :


1- un objectif à court terme : votre envie de la manger. Devant la perspective d’éprouver un plaisir instantané, il s’agit d’une pulsion qui se manifeste immédiatement, même si vous savez fort bien que cette pulsion se résorbera par la suite.
2- un objectif à plus long terme, dicté par la raison, qui a du mal à se faire entendre : perdre du poids et être en santé.

Quelle stratégie adopter ?

Stop ! Prendre une grande respiration et réfléchir. Prendre le temps de se convaincre de ce que l’on sait déjà : Ne pas manger la tablette de chocolat ou la remplacer par un aliment plus sain. Malheureusement, pour la plupart d’entre nous, ce mode opératoire fonctionne rarement. À moins que ce soit au prix d’efforts considérables.

Heureusement, il existe une autre solution : Inversons le problème. D’abord modifions notre comportement. Agissons immédiatement, sans avoir recours au préalable à un précepte moral. En d’autres mots, agir avant de réfléchir.  

Faire appel aux objets

Pour cela nous devons faire appel aux objets. Notre relation avec notre environnement est presque toujours médiatisée par des objets. Les objets ont le pouvoir de changer directement notre comportement, de manière quasi automatique, sans que nous ayons à réfléchir. L’idée est de choisir des objets qui créent, pour nous, une friction bénéfique et constante. Une friction qui modifie nos comportements en fonction des changements que nous aimerions opérer dans notre vie. Des objets qui nous forcent à poser certains gestes ; des gestes qui à force d’être répétés provoquent, petit à petit, des changements durables.

Choisir les bons objets peut être très efficace pour s’habituer à ranger et à mieux s’organiser.

Des objets frictionnels

Évidemment tout réside dans le design de ces objets. Des objets frictionnels et si possible rigolos qui nous assistent dans la réalisation de notre stratégie de changement. La fabrication d’objets frictionnels doit suivre certaines étapes :

1. Définir nos objectifs à long terme (objectifs de santé, éthiques, sociaux).

2. Identifier les activités, les comportements qui pourraient contrevenir à la réalisation de ces objectifs (la fameuse tablette de chocolat quotidienne).

3. Repérer des comportements qui nous permettraient de réaliser plus efficacement nos objectifs.

4. Trouver ou concevoir des objets frictionnels qui nous aideront concrètement à changer nos comportements. Songez à des objets qui matérialiseront » nos intentions. Des objets qui auront le pouvoir de restructurer nos actions.

Un nouveau marché ?

Depuis quelques années déjà, il existe sur le marché des produits qui pourraient nous assister dans notre stratégie de changement. Fitbit, par exemple, se charge de monitorer nos activités physiques et même notre sommeil. Mais il s’agit avant tout de technologies persuasives. Elles s’adressent à notre cerveau rationnel. Elles ne concernent que certaines sphères d’activités. Elles sont peu efficaces auprès de ceux qui, dans le cas de Fitbit, sont récalcitrants à l’idée de faire du sport.

Matthias Laschke conçoit des objets frictionnels spécifiques à différents types de changement de comportement. L’intitulé de ses objets résume bien leur mode opératoire : pleasurable troublemakers (des fauteurs de troubles agréables).

Quelques exemples

FORGET ME NOT par MATTHIAS LASCHKE, Fauteurs de troubles agréables par Sylvie Gendreau

Forget me not

Un luminaire de lecture dont l’abat-jour se ferme lentement à l’instar des pétales d’une fleur. Si l’on touche un pétale, l’abat-jour s’ouvre à nouveau et l’intensité lumineuse augmente. L’usager est ainsi en constante interaction avec le luminaire. Il ne l’utilise qu’en cas de besoin, et à chaque fois le comportement du luminaire lui rappelle que l’électricité est une ressource limitée.

Intervator, le fauteur de troubles de Mathias Laschke Fauteurs de troubles agréables pour changer de comportement par Sylvie Gendreau

Intervator

Le manque d’exercices physiques est à la source de nombreux problèmes de santé. Comment faire un peu plus d’activités physiques dans notre vie quotidienne ? L’intervator est un objet parasite placé sur le panneau de contrôle d’un ascenseur. En pressant sur le bouton d’un étage, l’ascenseur stoppe à l’étage en dessous pour nous inciter à prendre l'escalier pour nous rendre au dernier étage ou  presser le bouton de l’étage au-dessus pour nous rendre directement à destination.

Pourquoi ne pas. fabriquer votre objet trouble-fête pour chasser une mauvaise habitude ?

Envie de tenter l’expérience ?

DÉCOUVREZ L’EXERCICE No. 28

Fabriquer son objet trouble-fête


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Références

Hassenzahl, M., Eckoldt, K., Diefenbach, S., Lenz, E., Laschke, M., & Kim, J. Designing Moments of Meaning and Pleasure. Experience Design and Happiness. International Journal of Design, (2013), 7(3), 21–31.

Hassenzahl, M., & Laschke, M. Pleasurable Troublemakers. In S. Walz & S. Deterding (Eds.), The Gameful World. (2014), Cambridge, MA: MIT Press. 167-195.

Laschke, M., Diefenbach, S., & Hassenzahl, M (2015). “Annoying, but in a nice way”: An inquiry into the experience of frictional feedback. International Journal of Design, 9(2), 129-140.

*Pleasurable trouble makers