🔴 Jusqu’où sommes-nous épiés ?

Suivis, traqués, surveillés…

Comment rester sereins ? Comment rester libres ?

Toutes les opérations que nous effectuons sur nos écrans sont méticuleusement analysées par les entreprises à l’origine des plateformes que nous consultons ou que nous utilisons pour effectuer nos achats.

Jusqu’où sommes-nous épiés ? par Sylvie Gendreau

Jusqu’où sommes-nous épiés ? par Sylvie Gendreau

L’un des principaux acteurs de la société de l’information dans laquelle nous évoluons est bien sûr Google.

Les transactions que nous effectuons en utilisant nos téléphones, nos tablettes ou nos ordinateurs peuvent être regroupées selon les quatre usages suivants :

  1. Extraction et analyse de données

  2. Nouvelles formules contractuelles dues Ă  un meilleur monitoring

  3. Personnalisation

  4. Expériences réalisées en mode continu

La nature de ces nouveaux usages et de leurs conséquences met en évidence une logique sous-jacente que la professeure Shoshana Zuboff* de l’Université Harvard qualifie de capitalisme de surveillance.

Le capitalisme de surveillance doit son existence à un réseau généralisé et mondialisé de transactions effectuées à partir de téléphones, de tablettes et d’ordinateurs.

La capitalisme de surveillance est constitué d’innombrables dispositifs d’extractions de données, de marchandisation et de contrôle qui ont pour effet d’objectiver un individu, modélisant son comportement actuel et prévoyant son comportement futur.

Chaque nouvelle technologie est définie par ce qu’elle peut dorénavant permettre, ce que les technologies qui la précèdent ne sont pas en mesure de réaliser. Mais une technologie n’est pas neutre. Elle se développe et évolue selon une logique institutionnelle.

Actuellement, les technologies numériques transactionnelles se développent dans le but (pas toujours avoué) de connaître, contrôler et modifier le comportement des utilisateurs afin de mettre en marché de nouveaux produits et services, de monétiser et de contrôler.

L’entreprise Google a rapidement compris de quelle façon la capture d’immenses quantités de données, leur stockage et leur analyse pouvaient avoir des retombées considérables sur les campagnes publicitaires.

Google fait des Ă©mules

Les pratiques du capitalisme de surveillance constituent un défi de taille pour la vie privée et les lois en vigueur qui vise à la protéger. Par conséquent, Google et ses pairs, font tout ce qu’ils peuvent pour rendre leurs pratiques les moins transparentes possibles. Si on tente de leur barrer la route, les entreprises déploient des ressources considérables pour défendre les territoires qu’elles ont déjà conquis.

Le capitalisme de surveillance a pris racine en opérant rapidement, espérant demeurer indétectable le plus longtemps possible. Il existe actuellement une telle asymétrie de connaissances et de droits (les droits réels, c’est-à-dire ceux que l’on peut espérer faire valoir devant une cour de justice avec le service d’avocats expérimentés, mais dont les honoraires élevés ne permettent pas à la majorité des citoyens d’avoir recours.

De toute façon, l’utilisateur a développé au fil des ans une dépendance très forte aux nouvelles technologies numériques. Elles sont devenues des instruments indispensables de participation sociale et économique.

Google fait des émules Jusqu’où sommes-nous épiés ? par Sylvie Gendreau

Google fait des émules Jusqu’où sommes-nous épiés ? par Sylvie Gendreau

Le capitalisme de surveillance a des répercussions sociales et politiques considérables :

  • La dĂ©mocratie, considĂ©rĂ©e comme Ă©tant un facteur de prospĂ©ritĂ©, est perçue, au contraire, comme une menace, risquant de compromettre les revenus provenant de la surveillance.

  • La frontière entre les agences gouvernementales chargĂ©es de la sĂ©curitĂ© et les grandes entreprises du capitalisme de surveillance devient de plus en plus poreuse.

  • Le capitalisme de surveillance a acquis une importance socio-Ă©conomique prĂ©pondĂ©rante. Advenant un conflit d’intĂ©rĂŞts portant sur des enjeux sociaux d’importance planĂ©taire, comme le rĂ©chauffement climatique, les inĂ©galitĂ©s de revenus ou les droits Ă  la vie privĂ©, ce sera les intĂ©rĂŞts du capitalisme de surveillance qui prĂ©vaudront.

  • Les rĂ©sultats des poursuites qui jusqu’ici ont Ă©tĂ© intentĂ©es contre les grands joueurs du capitalisme de surveillance ne laissent aucunement prĂ©sager de modifications significatives du modèle.

Les données, clés pour le futur

Avant d’aborder d’autres perspectives possibles, différentes et peut-être plus réjouissantes, pourquoi ne pas tenter de faire un saut dans le futur et envisager ce que nous réserve le capitalisme de surveillance dans quelques années.

Le capitalisme de surveillance a ouvert une boîte de pandore : celle des données massives. Actuellement, l’analyse de ces données n’en est qu’à ses débuts. Mais, dans un avenir rapproché, les algorithmes d’intelligence artificielle se développeront et la capacité accrue des systèmes de traitement de données rendra possible le développement exponentiel de nouvelles techniques d’analyse et de prédiction beaucoup plus efficaces que celles que l’on utilise en ce moment.

Nous nous retrouverons alors dans la situation très inconfortable qui consiste à devoir satisfaire simultanément à deux exigences contraires, une double contrainte :

- D’une part, nous deviendrons tributaires d’un système très sophistiqué de prédiction de nos comportements et de l’évolution de nos systèmes (économiques, politiques, etc.). Cette dépendance nous inquiétera, car nous ne serons pas en mesure de comprendre la logique de ce système ; sa complexité nous échappera (elle commence déjà à nous échapper dans le domaine financier) et nous ne pourrons que constater que les fondements mêmes de ce système reposent sur l’acceptation quasi aveugle de la fourniture massive et quasi gratuite de nos données sur nos comportements aux grandes entreprises du capitalisme de surveillance.

- D’autre part, notre souhait de nous affranchir de cette dépendance deviendra de plus en plus illusoire. En effet, comment supplanter cette intelligence artificielle et la remplacer par un système tout aussi, ou plus efficace ? Le cerveau humain aura-t-il atteint une limite face à la complexité des systèmes de l’IA qui seront mis en place sur le plan politique, comment faire face à la puissance financière et au désir de contrôle des grands joueurs du capitalisme de surveillance (intérêts privés et états considérés conjointement) qui défendront leur forteresse bec et ongles ?

Impossible d’imaginer notre vie sans Facebook sans avoir le sentiment de manquer quelque chose d’important. Les journalistes, en cherchant des solutions Ă  l’emprise des entreprises privĂ©es sur notre libertĂ© d’expression, affirmaient Ă©galement que se retirer des mĂ©dias sociaux n’était dĂ©jĂ  plus possible, car cela signifierait se mettre Ă  l’écart de la sociĂ©tĂ©. Ce ne n’est dĂ©jĂ  plus une responsabilitĂ© individuelle, disaient-ils. Ă€ la fin 2018, Facebook** comptait plus de 2,32 milliards d'utilisateurs actifs chaque mois et 1,52 milliards d'utilisateurs actifs chaque jour dans le monde !

Je remarque que mes étudiants, tout en utilisant Facebook, sont préoccupés par ces situations. Ils essaient d’imaginer d’autres moyens, d’autres plateformes, d’autres stratégies. Les problèmes stimulent notre créativité.

Je serais curieuse de vous lire. Que pensez-vous que nous pourrions inventer pour prévenir les scénarios pessimistes ? Comment devrions-nous nous comporter ?

Personnellement, je pense que nous pourrions créer des communautés virtuelles plus petites. Avons-nous vraiment besoin d’être sur des réseaux de 2.32 milliards de personnes ?

L’autre phénomène dont on devrait se méfier, ce sont les nouvelles habitudes qui découlent de notre dépendance des réseaux sociaux.

La peur d'ĂŞtre sur la touche

« Selon une enquĂŞte nationale sur le stress menĂ©e par Omnivit, la moitiĂ© des Belges s’imposerait une pression supplĂ©mentaire pour profiter au maximum de leur vie. La « peur de rater quelque chose Â» serait un facteur de stress. »

Dans son article pour Marie-Claire, par Eva Diaz Gonzalez*** Ă©crit : « Jamais la FOMO  (Fear Of Missing Out ou la peur de rater quelque chose), la jalousie et le sentiment de devoir se montrer sous son meilleur jour, ne s’était autant manifestĂ©e. En cause : une utilisation supĂ©rieure Ă  la moyenne des rĂ©seaux sociaux. En effet, la vitrine sociale que ces derniers reprĂ©sentent force les Belges Ă  penser qu’ils doivent exceller et ĂŞtre prĂ©sents partout. »

MĂŞme les amis seraient source de stress : « Le cercle d’amis serait, Ă©tonnamment, une grande source de stress. Par exemple, 46% ont peur de manquer des moments amusants, et 54% des rĂ©pondants se sentent coupables vis-Ă -vis de ses amis. Pire, quatre Belges de moins de 35 ans sur dix affirment avoir peur de perdre des amis lorsqu’ils annulent un rendez-vous. »

Cette semaine, une fois n’est pas coutume, je vous propose un exercice JOMO (Joy Of Missing Out ou le plaisir de rester sur la touche). Et pour optimiser ce temps calme (JOMO), découvrez comment reprogrammer votre cerveau pour être plus heureux et créer davantage.

Envie de tenter l’expérience ?

Découvrez l’exercice No. 108

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đź”» Pourquoi combattre son stress ?

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