Dessiner comme Copi 🟨
Deux raisons se cachent derrière cet article.
La première, le monde devient de plus en plus virtuel.
La deuxième, je suis tout le temps en mouvement. Certains jours, ma bibliothèque me manque.
Révisé 8 juillet 2020
Il y a quelques années, j'ai acheté un bel appartement à Montréal. Toutes les fenêtres donnaient sur le fleuve Saint-Laurent. Je l'ai aménagé comme une installation artistique. Et pour me déculpabiliser du luxe de certains accessoires... je répétais, je construis l'appartement de mes rêves, je n'en aurai plus jamais d'autres. Il y avait des bibliothèques dans toutes les pièces, tout était bien ordonné : La poésie. La littérature française, scandinave, japonaise, anglaise, germanique... les essais selon les différentes thématiques.... les bandes dessinées.... les livres d'art... J'avais créé le lieu de mes rêves, Zen et propice à la lecture et à la création.
Mais voilà qu'après quinze ans, j'avais déjà la bougeotte ! Depuis, ma vie a bien changé. J'ai troqué le fleuve québécois pour la mer bretonne. Entre temps, j'avais aussi habité Paris. Et puis un jour, il n'y a plus eu Paris ni Montréal, mais seulement Saint-Malo. Un appartement sous les toits, dans une maison où vivent trois familles. Une jolie vue sur l'Estuaire de la Rance, un lieu de bord de mer sympa... mais petit pour y vivre et y avoir un atelier. Les deux bibliothèques ont accueilli le plus de livres possible, d'autres ont trouvé une petite place sur une table ou sur le sol dans un coin... et tous les autres sont partis au garage dans des caisses. L'été dernier, avec l'humidité des lieux, j'ai compris qu'il valait mieux que les livres retournent à l'air libre. Je les ai distribués, aux quatre vents, à mes amis bretons.
Et moi, j'ai continué à bouger avec mes gros sacs et mes valises... contenant toujours un livre ou deux, et surtout mon I-pad qui est devenu ma bibliothèque virtuelle. Certains jours, le vieux rêve refait surface. J'adore les bibliothèques et les ateliers qui débordent de livres et de carnets. J'adore l'odeur de l'encre et le contact avec le papier. Cet été 2015, j'ai décidé de me constituer une bibliothèque virtuelle pour garder des traces des belles lectures et vous en faire profiter par la même occasion. Après Siddhartha, voici, dans un tout autre registre, Copi, un livre blanc.
L’influence d’une grand-mère, femme de théâtre
Les Cahiers dessinés sont une belle collection de Buchet-Chastel. Le livre sur Copi est particulièrement réussi. Dramaturge, romancier et dessinateur, Copi est le surnom que lui donnait sa grand-mère, une femme de théâtre au caractère bien trempé dont il était très proche.
De son vrai nom, Raul Damonte est né en 1939 à Buenos Aires dans une famille argentine francophone et cultivée. Son père, député anti-péroniste, dirige un journal. Son fils, âgé d'à peine 12 ans, le sauve au moment où la police vient l'arrêter chez lui. Il écrit en vitesse un message sur un bout de papier qu'il attache à un cendrier de cristal. En le jetant par la fenêtre, le cendrier se casse dans la cour en faisant un bruit qui alerte la concierge, elle peut prévenir le père de Copi lorsqu'il rentre de la présence de la police afin qu'il ne monte pas chez lui.
Il se fait connaître en publiant une bande dessinée humoristique.
Dès sa jeunesse, la vie de Copi est constituée de moments marquants. Précoce, il collabore, dès l’âge de 16 ans, au journal satirique Tia Vicenta. Il part ensuite vivre avec son père à Haïti, puis à New York avant d'émigrer à Paris où il se fait connaître dans les années 60 en publiant chaque semaine dans les colonnes du Nouvel Observateur une bande dessinée humoristique et intellectuelle, dont l'héroïne est une femme assise (qui ne bouge pas et campe sur ses positions, l'opposé de Copi) dialoguant le plus souvent avec un poulet.
Des dessins minimalistes et surréalistes
Ses dessins minimalistes surréalistes font beaucoup parler et le font vivre le temps qu'il s'adonne à sa passion : le théâtre. Copi est un dialoguiste hors pair. En tant que dessinateur, il collabore à de nombreux journaux, Hara-Kiri, Charlie, Le Gai-Pied, Libération, ses dessins sont réunis dans plusieurs albums. Écrivain original et provocant, il publie des romans chez Christian Bourgeois, Albin Michel, Hallier ou Belfond et de nombreuses pièces de théâtre qui sont jouées dans le monde entier.
Le Livre blanc est un livre rare. Publié en 1970 à Milan, il n’a jamais été réédité ni traduit. On y découvre un Copi qui se soucie moins de noircir du papier que de souligner le silence des pages blanches. Et dans ce silence, il se fabrique un monde pétaradant dont il a le secret, comme ça, l’air de rien, au fil de l’inspiration – et quelle inspiration !
Est-ce un livre de prières, une bande dessinée, un conte, le début d’un roman, ou serait-ce le dernier acte d’une comédie ? C’est surtout un ouvrage inimitable : personne, probablement, n’avait écrit et dessiné avec autant de spontanéité, voire de désinvolture. Ce n’est plus un livre, c’est une improvisation théâtrale sur une scène de papier.
Interdit de séjour dans son pays à cause de ses écrits sulfureux, Copi disait qu'il avait perdu la langue de son enfance (l'espagnol) et ne possédait pas tout à fait le français :
« J'écris en dessinant » avait-il l'habitude de dire.
Je propose que vous vous en inspiriez. Le livre blanc me fait aussi penser Ă des pages d'esquisses avant d'imaginer une histoire.
Comment développe-t-on un scénario ?
Il est amusant de voir les mêmes questions qu'il répète avec des réponses différentes comme s'il testait différents dialogues.
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