Si vous ĂȘtes terrien đ± vous avez besoin de la nature
Vers 2050, 70% des terriens vivront en ville.
Quâaurons-nous alors perdu ? Quâaurons-nous laissĂ© derriĂšre nous ?
Pour certains, les contacts avec leur environnement naturel seront Ă©pisodiques, de courtes durĂ©es et entachĂ©s de tous les artĂ©facts visuels et sonores qui en dĂ©naturent lâexpĂ©rience. Ils naĂźtront et vivront dans un milieu exclusivement urbain. Peu dâentre eux ressentiront la nostalgie dâune vie passĂ©e vĂ©cue au contact direct avec la nature.
Pourtant, nous tous, qui que nous soyons, engrangeons dans notre mémoire collective, des souvenirs ataviques, inconscients, de liens directs et puissants qui nous relient au milieu qui a donné naissance à notre espÚce.
Une Ă©tude rĂ©cente menĂ©e aux Ătats-Unis rappelle lâimportance dâune immersion dans un milieu naturel pour notre bien-ĂȘtre psychique.
Des chercheurs californiens* ont demandĂ© Ă une soixantaine de participants dâentreprendre une promenade de 50 minutes dans divers milieux naturels et urbains des environs de Stanford.
Les participants, avant et aprĂšs leurs promenades, ont rĂ©pondu Ă une sĂ©rie de questions visant Ă Ă©valuer lâimpact de leurs promenades sur leurs facultĂ©s cognitives et Ă©motionnelles.
Les résultats démontrent que les promenades dans un milieu naturel présentent plusieurs bénéfices par rapport à celles en milieu urbain :
Sur le plan Ă©motionnel :
Diminution de lâanxiĂ©tĂ©
Diminution des ruminations
Diminution des affects négatifs
Augmentation des affects positifs
Sur le plan cognitif :
Amélioration de la mémoire de travail
Que se passe-t-il dans notre cerveau lorsque nous sommes immergés dans un milieu naturel ?
David Strayer** enseigne la psychologie Ă lâuniversitĂ© d'Utah. Avec ses Ă©tudiants, il organise des excursions dans la nature. AprĂšs un sĂ©jour de trois jours dans un parc naturel des environs, ses Ă©tudiants amĂ©liorent de moitiĂ© leur crĂ©ativitĂ©. Ils deviennent plus performants pour rĂ©soudre des problĂšmes.
Pour en savoir plus sur les mĂ©canismes neuronaux Ă lâoeuvre, Strayer soumet ses Ă©tudiants Ă des expĂ©riences. Il utilise un encĂ©phalographe portatif et mesure in situ lâimpact quâa le milieu naturel sur notre cerveau.
Les rĂ©sultats dĂ©montrent quâune immersion dans un milieu naturel permet au cortex prĂ©frontal de se reposer.
Les mĂ©canismes Ă lâoeuvre sont encore mal identifiĂ©s, mais plusieurs Ă©tudes confirment le fait quâune immersion dans la nature a pour effet de rĂ©duire le stress. Et une diminution du stress prĂ©sente de multiples bĂ©nĂ©fices pour lâhomme : rĂ©cupĂ©ration physique et mentale, performance physique et cognitive accrue, rĂ©duction des comportements agressifsâŠ
Le stress peut ĂȘtre positif***. Câest celui qui est occasionnel et qui nous rend plus alertes et plus performants. Le corps humain rĂ©agit en consĂ©quence. Il est constituĂ© pour supporter sans difficultĂ© un certain niveau de stress.
Mais le stress peut aussi ĂȘtre nĂ©gatif, en particulier en milieu de travail, lorsquâun individu est soumis Ă une pression continuelle, sans quâil y ait de phases de rĂ©cupĂ©ration.
Mais comment mesure-t-on le stress ? Peut-on sâen remettre Ă une Ă©valuation subjective ? Existe-t-il des mesures objectives ?
Il existe deux hormones Ă©troitement reliĂ©es aux symptĂŽmes du stress : les glucocorticoĂŻdes et lâĂ©pinĂ©phrine. Une sĂ©crĂ©tion soudaine de ces deux hormones se produit lorsque notre organisme est soumis Ă un niveau Ă©levĂ© de stress. Il est donc possible dâĂ©valuer le niveau de stress en mesurant la concentration de ces deux hormones, mais la procĂ©dure et les Ă©quipements requis rendent la mesure peu adaptĂ©e.
Des chercheurs thaĂŻlandais*** ont plutĂŽt optĂ© pour une approche moins coĂ»teuse et plus efficace pour mesurer le stress en milieu de travail. Ils ont utilisĂ© un systĂšme embarquĂ© incluant la mesure de la frĂ©quence cardiaque ainsi que lâenregistrement des ondes Ă©lectroencĂ©phalographiques. Le dispositif combine un bracelet et un casque.
Une autre Ă©quipe de chercheurs de Singapour***** a plutĂŽt optĂ© pour le casque commercial Emotiv Epoc pour mener son Ă©tude. AprĂšs une Ă©tape de calibrage, le casque a Ă©tĂ© utilisĂ© pour mesurer le niveau de stress. Le stress se manifeste par une diminution des ondes alpha et une augmentation simultanĂ©e des ondes bĂȘta. Il est ainsi possible de dĂ©velopper des systĂšmes peu coĂ»teux de mesure objective du stress qui peuvent ĂȘtre utilisĂ©s in situ.
Lucas Foglia a tirĂ© des expĂ©riences de David Strayer de magnifiques photos. Le succĂšs quâa connu son livre illustre Ă quel point nous avons besoin plus que jamais de nous relier Ă la nature. Parfois, il suffit de peu. Dans un Ă©difice Ă bureaux, une fenĂȘtre donnant sur un espace de nature procurera chez les employĂ©s un niveau plus Ă©levĂ© de bien-ĂȘtre et de satisfaction.
Pour ma part, je donne souvent mes cours en marchant à l'extérieur, les étudiants sont crevés à la fin d'une journée d'atelier, ils n'ont pas l'habitude de marcher autant, mais je demeure convaincue qu'il se réveille en pleine forme, physiquement et intellectuellement, le lendemain !
Je vous encourage donc à sortir à l'extérieur pour stimuler votre créativité. Vous trouverez bien un parc ou quelques arbres à proximité.
Envie de tenter lâexpĂ©rience ?
DĂCOUVREZ LâEXERCICE No. 73
Ă la recherche de la nature
RĂ©flĂ©chir avec l'Ćuvre de Han Kang, laurĂ©ate du Prix Nobel de littĂ©rature 2024, qui explore la nature comme reflet de nos traumatismes personnels et collectifs.